En matière de régimes fiscaux incitatifs, le législateur français a indéniablement fait siennes ces deux maximes. Le projet de loi de finances pour 2023, actuellement en discussion à l’assemblée nationale , illustre bien ce propos s’agissant du dispositif concernant les Jeunes Entreprises Innovantes prorogé et modifié à plusieurs reprise.
Ce mécanisme à visée d’incitation fiscale consiste en une exonération totale puis partielle d’impôt sur les bénéfices, ainsi que, sur décision des collectivités territoriales, de taxe foncière sur les propriétés bâties et de contribution économique territoriale. Instauré pour favoriser l’innovation, il concerne les jeunes entreprises, on verra par la suite le sens à donner à cette désignation, dont les dépenses de recherche et de développement représentent au moins 15% de leurs charges fiscalement déductibles.
Ce qui a changé ? La durée de vie du dispositif lui-même tout d’abord. Contenu dans la loi de finances pour 2004, le statut de la JEI aurait dû théoriquement prendre fin au 31 décembre 2013. Il aura été prorogé, si la loi de finances pour 2023 est définitivement adopté sur ce point, pas moins de quatre fois, à savoir fin 2013, 2016, 2019 et 2022. En l’état actuel du texte, il devrait finalement bénéficier aux entreprises créées jusqu’au 31 décembre 2025.
C’est aussi la définition de la jeune entreprise qui a été amenée à évoluer à plusieurs reprises, bien que dans une moindre mesure. Initialement applicable aux entreprises créées depuis moins de 8 ans, le statut a, fin 2021, été étendu aux entreprises créées depuis moins de 11 ans, cette réforme étant applicable aux entreprises âgées de moins de 8 ans à la date de son adoption et uniquement en ce qui concerne l’impôt sur les bénéfices. Il devrait finalement être ramené à 8 ans mais uniquement pour les entreprises créées à compter du 1er décembre 2023, ce qui n’est somme toute pas illogique s’agissant d’une restriction de la portée d’un dispositif déjà en vigueur.
Enfin, les périodes d’exonération totale puis partielles initialement fixées à 36 et 24 mois, ont été ramenées toutes deux à 12 mois par la loi de finances pour 2013.
Il est aisé de déplorer l’instabilité du système fiscal français. Mais faute de pouvoir agir utilement sur ce paramètre, il est urgent de se saisir des opportunités lorsqu’elles existent, sans s’interroger de manière excessive sur leur pérennité dès lors que leur mise en œuvre n’entraîne pas de coûts excessifs.
C’est également l’occasion de souligner à nouveau que faire valider son résultat fiscal par l’administration n’est pas complètement satisfaisant en termes de gestion du risque, si l’on considère le risque majeur que constitue justement la perte d’une opportunité.