Brèves de vestiaires n°1

Création d’une nouvelle rubrique sur le site internet du Cabinet CALC-Avocat, les Brèves de vestiaires.

Non, ce n’est pas du vestiaire des avocats dont il s’agit, mais bien du vestiaire des sportifs. Cette newsletter sera en effet dédiée aux actualités fiscales, qu’elles soient d’origine légale, doctrinale ou jurisprudentielle, susceptibles de présenter un intérêt pour les as du ballon, rond ou ovale, les champions de la glisse, et j’en passe.

Au menu de ces Brèves de vestiaires n° 1, on trouvera notamment un questionnement sur l’application du régime des impatriés aux sportifs étrangers ayant choisi volontairement de rejoindre un Club français, le risque de remise en cause du régime fiscal d’exonération des associations sportives entretenant des liens privilégiées avec une entreprise, les dispositions de la loi de finances en lien avec les JO 2024, et enfin la décision du CE du 5 novembre 2021 concluant à la non application de l’article 155 A du CGI, dispositif destiné à lutter contre les Rent-A-Star companies et ayant impacté de ce fait grand nombre de sportifs, aux produits tirés de licences de marques.

Bonne lecture !

Régime des impatriés : la décision de la Cour Administrative d’Appel de Paris du 10 juin 2022 sécurise la position des sportifs étrangers

La Cour Administrative d’Appel de Paris a récemment pris position en faveur des contribuables en considérant dans cet arrêt que le dispositif de l’article 155 B du CGI, dit régime des impatriés, est ouvert aux salariés qui n’ont pas directement été démarchés par une entreprise française pour venir travailler en France mais qui ont postulé à une annonce. Pour mémoire, l’article 155 B, très grossièrement résumé, permet l’exonération pendant 8 ans du supplément de rémunération versé à un salarié étranger pour le faire venir.

Cet arrêt semble contredire la doctrine administrative qui exclut du bénéfice de l’exonération les salariés qui sont à l’initiative de l’expatriation.

Rapportée au cas des sportifs professionnels, notamment les footballeurs, qui useraient largement de ce mécanisme, on peut s’interroger sur la portée de cette restriction doctrinale. Certes, les joueurs répondent rarement à des annonces. De là à dire qu’ils ne viennent pas en France de leur propre initiative mais à la demande exclusive d’un club français, le débat est à mon avis ouvert.

Cette décision si elle est confirmée aura de fait le mérite d’éviter des discussions stériles s’agissant de transferts qui font l’objet de tractations confidentielles et dont il paraît difficile de déterminer duquel, entre le club et l’agent du joueur, lesquels les a amorcées. Ceci étant, l’administration fiscale semblait déjà avoir conscience de cette et fondait plutôt ses redressement sur l’obligation faite au joueur de démontrer que son salaire imposable in fine est au moins égale à celui d’autres joueurs de même niveau, cette preuve étant extrêmement difficile à rapporter.

Conseil d’Etat 17 octobre 2022 Une association sportive entretenant des relations avec une entreprise commerciale est fiscalisée, quel que soit la rentabilité pour cette dernière de cet apport de chiffre d’affaires

Parmi les critères à remplir pour qu’une association puisse être considérée comme non lucrative, et donc exonérée des impôts commerciaux, figure celui de l’absence de relations privilégiées avec une entreprise. L’idée est qu’une association qui permet à une entreprise commerciale d’augmenter son chiffre d’affaires ne doit pas pouvoir bénéficier de cet avantage. Cette règle paraît dictée par la nécessité de ne pas créer de distorsions anormales de concurrence. Le Conseil d’Etat (9ème et 10ème chambres réunies 17 octobre 2022) a considéré dans cette espèce que cette règle s’applique même lorsque ces opérations se présentent comme moins rentables pour l’entreprise que ses activités habituelles.

Loi de finances pour 2023 Neutralisation de la double imposition des sportifs résidents de pays non conventionnés

En l’absence de convention fiscale, les sportifs et autres personnes exerçant une activité en relation avec les JO de 2024 risqueraient de subir une double imposition. La loi française les soumet en effet à l’impôt sur le revenu en France, quelle que soit leur situation fiscale dans leur pays de résidence. La loi de finances pour 2023  édicte donc pour une période de temps limitée un droit pour le sportif à demander le remboursement de l’impôt acquitté hors de France, dans la limite de l’impôt français.

Loi de finances pour 2023 Renouvellement du régime d’exonération dont bénéficient certains organisateurs de compétitions sportives internationales se tenant sur le sol français

Le Code Général des Impôts prévoyait pour les manifestations sportives dont l’organisation a été attribuée à la France avant le 31 décembre 2017 une exonération d’impôt sur les bénéfices notamment. Ce régime a été pérennisé et s’applique maintenant aux manifestations postérieures au 31 décembre 2017 (article 29 de la loi de finances pour 2023). Par ailleurs, il a été adapté afin que puissent en bénéficier non seulement les organismes en cause et leurs filiales mais également leurs sous-filiales.

Article 155 A du CGI : le point sur les dernières jurisprudences

L’article 155 A du CGI prévoit l’imposition en France des sommes reçus par une société établie hors de France en rémunération de services rendus par une personne physique établie ou domiciliée en France. Destiné à lutter contre l’usage des « Rent-a-star companies», ce dispositif est fréquemment utilisé à l’encontre sportifs lorsque leur droit à l’image sont exploités par une société étrangère.

Un arrêt du Conseil d’Etat du 5 novembre 2021 est venu confirmer une jurisprudence de 2020 dont portée était discutée en énonçant que les dispositions de l’article 155 A ne sont pas applicables aux redevances versées pour la concession de l’usage d’une marque ou d’un brevet car ils ne constituent pas la rémunération d’un service c’est-à-dire l’accomplissement d’un travail ou d’une activité humaine.

Cet arrêt ne concernait pas le monde du sport mais la décision paraît tout à fait transposable aux redevances versées pour l’exploitation d’un droit à l’image.